Dans le Loir-et-Cher, le bocage marque aujourd’hui principalement le Perche et les vallées. Les haies, les arbres isolés, y dessinent soigneusement le paysage, accompagnant les talus, les chemins, les bâtiments et les limites de propriétés.
Il a fallu leur raréfaction drastique au cours des dernières décennies, avec les remembrements et les retournements des prairies, pour que leurs valeurs multiples soient remises en évidence et que des actions de préservations et de replantations soient timidement engagées. Les haies et structures bocagères rendent en effet de nombreux services : protection des cultures contre les vents, enclos et ombrage pour les animaux, protection des sols contre l'érosion, refuge pour les auxiliaires des cultures, pour le gibier et pour la biodiversité en général, agrément des paysages et des cheminements.
L’histoire du réseau bocager est longue ; ce qu’il forme aujourd’hui est hérité des premiers défrichements du Moyen-Age, jusqu'à l'apogée du bocage vers la moitié et la fin du XIXe siècle, au moment du pic de population rurale. Le maillage continu qu’il a constitué alors, sous forme de haies, de bois et d’arbres isolés, s’accompagnait d’un dense réseau de chemins, souvent creux, irriguant tout l’espace rural pour relier champs, fermes, hameaux et villages.
Le déclin du bocage en Loir-et-Cher est apparu au début du siècle. Depuis une bonne cinquantaine d’années, la mécanisation de l’agriculture, l’agrandissement des exploitations, la baisse drastique de main d’œuvre, la diminution du cheptel au profit des cultures, l’inadaptation des haies aux pratiques culturales modernes, ont accéléré la raréfaction de la haie dans le paysage rural. Même le Perche, région la plus représentative du bocage dans le département, est en voie de "champagnisation " avancée, notamment dans le sud-est.
En 1999, on estime encore à près de 11 000 kilomètres la longueur de haies dans le département dont 8 800 km de haies bocagères.
Les vallées sont par nature des terres d'élevage où le bocage associé est présent. Mais le retournement des prairies et la mise en culture des terres ont largement contribué à leur raréfaction :
- une partie de la vallée du Loir présente un paysage de bocage encore significatif, notamment entre la pointe est d'Artins et le bas de Ternay ; secteur très cloisonné par des haies perpendiculaires au Loir, il est mis en valeur par les pâtures. Des haies sont également présentes dans les vallons des affluents du Loir comme à Ternay ou à Sasnières. Le reste du val présente un bocage plus ou moins disparate mais apparaît globalement aujourd'hui largement ouvert, à dominante céréalière. Le bocage de la vallée du Loir a même par endroits totalement disparu comme sur les franges de Couture-sur-Loir ;
- la vallée de la Loire est une plaine alluviale où alternent actuellement principalement champs découverts et peupleraies. Elle a été autrefois un pays de haies, semblable au val de Loire actuel sur la partie angevine. Au XVIIIe siècle, sur le Loir-et-Cher, la haie était fréquente, accompagnant non seulement l'élevage mais également les cultures. Elle a disparu à partir du XIXe siècle pour laisser place à une agriculture spécialisée. Dans les années 1930, Roger Dion la décrivait ainsi : « Le Val, il n'y a pas un demi-siècle, était couvert, de toute son étendue, d'arbres, de diverses essences connues sous le nom de têtards. Ils tendent à disparaître de jour en jour, et avant peu, cette partie du territoire aura le même aspect que la Beauce » ;
- le val du Cher est historiquement un secteur d'élevage où le bocage est très présent. Aujourd'hui, il ne l'est plus que sur une partie, du fait de la « descente » de la céréaliculture dans le fond de vallée. Lié aux prairies et à l'élevage, il cerne alors de grandes parcelles et constitue un réseau de haies singulier. Les prairies alluviales du Fouzon, notamment, forment un ensemble remarquable. Sur les coteaux et le haut des plateaux, la viticulture a quasiment effacé toute couverture végétale, tandis qu'en retrait du Cher, les plateaux céréaliers sont ponctués par les traces de forêts dégradées. Il en résulte un certain nombre de parcelles boisées, quelques haies le long de certaines routes et chemins, ainsi que quelques arbres isolés.
En Sologne, la haie était très présente au XVIIIe siècle comme l’attestent les descriptions de la Sologne d’Arthur Young lors de son « Voyage en France » . Par ailleurs, l’atlas de Trudaine révèle la présence d’un bocage serré aux abords des exploitations. Les fermes s’ouvraient sur un pâtis entouré de haies que l’on appelait « la place » ; les haies canalisaient les troupeaux.
De cette organisation, il reste des traces ainsi que de nombreuses trognes, mais aujourd’hui les îlots de bocage sont dispersés et rares. Liés à de l’élevage bovin, on les retrouve surtout le long des vallées du Cher et de la Sauldre dans les prairies humides. L’agriculture actuelle recule et le paysage tend à se fermer, malgré la valeur cynégétique de la haie.
Quant à Sologne viticole, des haies y apparaissent très ponctuellement, en fond de vallon, aux abords des prairies, mais ne forment pas de maillage bocager.