Le paysage des étangs SolognotsLa Sologne ne serait pas la Sologne sans ses étangs : ils font partie de l’imagerie du pays, avec la forêt, la chasse et Chambord. Pourtant, les étangs Solognots se dérobent pour la plupart au regard. Ils sont discrètement implantés en chapelets dans les inflexions formés par les rus dont le chevelu dense vient se jeter dans les bassins de la Loire et du Cher ; ils restent environnés de bois, éloignés des voies de circulation, pris dans de vastes propriétés privées. Il faut le passage d’une route sur une « chaussée » (digue) pour que, au travers des feuillages, ils se laissent deviner. Certains étangs ont été par ailleurs « apprivoisés » par les communes, qui en ont fait souvent d’élégants espaces publics de proximité pour les villages, propices à la promenade. Mais la réalité de la perception ne laisse en rien deviner leur nombre. Seule une carte permet de prendre la mesure de la démesure : la myriades de taches bleues représente 3000 étangs ! La concentration la plus importante concerne un secteur d’environ 30 000 hectares dont le cœur se situe sur les communes de Marcilly-en-Gault, de Millancay et de Saint-Viâtre. Il représente à lui seul 10% de la superficie totale des étangs français. Il faut remonter au Moyen-âge pour comprendre leur origine. La Sologne, alors entièrement couverte de forêt, se transforme rapidement en un véritable marécage avec le défrichement intensif des moines, désireux d’en cultiver la terre. Paludisme et fièvre jaune font leur apparition. On creuse alors les étangs pour maîtriser la remontée de la nappe phréatique et assainir le territoire. Une chaussée munie d’une écluse au travers d’une petite vallée suffit à maintenir une nappe d’eau triangulaire. Bien vite, ils assurent de solides revenus à leurs propriétaires qui y pratiquent la pêche. L’étang rempli, on y apporte des alevins pour en retirer, deux ou trois ans plus tard, quelques quintaux de carpes, de brèmes et de chevesnes. Aux produits des champs, de l’étable et des bois, le Solognot ajoute le poisson de ses étangs. A l’origine artificiels, ces étangs se sont révélés être des milieux d’une grande richesse écologique, à la fois lieux de passage et de reproduction pour les oiseaux, qu’ils soient migrateurs ou non (canards, grèbes, mouettes, hérons, guifettes, rapaces, etc.), creusets de développement d’une végétation spécifique, abris pour de nombreux mammifères. Aujourd’hui, la faible rentabilité de la pisciculture extensive explique en partie l’état d’abandon de certains étangs et leur évolution lente vers un comblement par boisement. La déprise agricole entraîne le développement des friches, accentuant la fermeture des paysages.
![]() |
Agence Folléa-Gautier, paysagistes-urbanistes
Ne pas reproduire sans autorisation